Dans quelle mesure la pandémie va-t-elle affecter l’accès des patients aux soins dentaires et que peut-on faire pour y remédier ?

Comme nous l’avons vu lors de la dernière grande récession, l’accès aux soins dentaires diminue en période de crise économique, c’est une réalité indéniable. Alors que nous traversons actuellement non seulement une crise économique, mais également une crise de santé publique, nous devons nous préparer aux répercussions à long terme de cette situation sans précédent sur le secteur dentaire. Dans ce document, nous allons voir ce que cela implique pour les patients et les dentistes et, surtout, ce qu’il est possible de faire pour y remédier.

La COVID-19 et l’accès des patients aux soins dentaires

Peu de gens ont échappé aux conséquences financières de la pandémie. Beaucoup ont perdu leur emploi, certains ont même perdu leur couverture dentaire ou l’accès à des soins abordables. Bien d’autres encore ont subi des pertes de revenus liées aux fermetures obligatoires, aux congés imposés ou à une réduction des heures de travail.

Comme l’a révélé une étude récente publiée dans le Journal of the American Dental Association (JADA), les soins dentaires sont les premiers à pâtir des restrictions budgétaires. Dans les ménages ayant subi une perte d’emploi ou de revenu liée à la pandémie, il est nettement plus probable que les enfants n’aient pas bénéficié des soins dentaires nécessaires.

Outre la question de l’accessibilité financière, il y aura toujours des patients qui ne consultent pas pour cause d’anxiété ou de vulnérabilité en matière de santé. Malheureusement, ces patients vulnérables, à savoir : les personnes âgées et celles souffrant de troubles systémiques comme les maladies cardiovasculaires ; font partie des groupes les plus exposés aux problèmes de santé bucco-dentaire.

Lorsque les patients qui ont le plus besoin de nous sont ceux qui ont le moins accès aux soins, qu’est-ce que cela implique à long terme pour leur santé ?

Ce qu’un accès réduit aux soins signifie pour les patients...

Les patients n’ont souvent pas conscience des premiers stades des maladies bucco-dentaires telles que les caries, la parodontite et le cancer de la bouche. Il est essentiel de consulter régulièrement un dentiste pour effectuer un diagnostic et une prise en charge précoces, faute de quoi ces maladies progresseront inévitablement de façon incontrôlée.

Au fur et à mesure que les affections bucco-dentaires progressent, il est possible que les patients tardent à consulter jusqu’à ce que les symptômes s’aggravent. À ce stade, le patient risque de lourdes complications comme un abcès parodontal, une pulpite irréversible et la perte d’une dent.

... et pour les dentistes

Les dentistes sont déjà éprouvés financièrement par la réduction du nombre de patients doublée de l’augmentation du coût des EPI. Même si les cabinets rouvrent, les dentistes ne peuvent pas encore retrouver leur volume d’activité d’avant la pandémie en raison des mesures de protection renforcées.

La baisse de la demande des patients associée à une capacité réduite s’avère financièrement insupportable pour les dentistes. En 2020, la British Dental Association indiquait que seuls 8 % de ses membres étaient confiants dans leur capacité à maintenir leur stabilité financière sans aide gouvernementale.

Les dentistes sont désormais dans une situation difficile : ils ont désespérément besoin que les patients reviennent mais, quand ils le font, ils présentent souvent une moins bonne santé bucco-dentaire en raison de pathologies non prises en charge. Cela veut dire plus de douleur, plus de traitements et plus de dépenses pour le patient, qui peut alors diriger son mécontentement vers le praticien.

En tant que dentiste, que pouvez-vous faire concrètement pour protéger les intérêts de vos patients et les revenus de votre cabinet ?

  1. Redoubler d’efforts en matière de prévention

Alors que la pandémie perdure et que le chemin vers la guérison est incertain, il faut s’attendre à ce que l’accès aux soins soit encore restreint pendant un certain temps. Dans cette optique, les dentistes doivent redoubler d’efforts en matière de prévention maintenant afin de pallier les conséquences de la maladie ultérieurement.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les caries non soignées sur les dents permanentes sont déjà le problème de santé le plus répandu à travers le monde et 530 millions d’enfants souffrent de caries sur leurs dents temporaires. À long terme, nous verrons sans doute encore plus de patients présentant des lésions avancées, y compris avec atteinte pulpaire.

Au cabinet, vous pouvez prévenir ou enrayer le développement des caries dentaires en utilisant des sealants ou des vernis fluorés chez les patients à haut risque. Cependant, comme les occasions d’intervenir directement se font plus rares, vous devrez également penser aux actions possibles au-delà du cabinet afin de toucher les patients les plus vulnérables.

L’article du JADA mentionné plus haut a montré que les familles sont moins susceptibles de renoncer aux soins médicaux qu’aux soins dentaires. Voilà une occasion pour vous de communiquer avec vos patients en utilisant une approche interdisciplinaire. Les auteurs recommandent de faire appel à des professionnels de santé non dentaires, tels que les médecins, les assistants sociaux et les agents de santé communautaire, pour sensibiliser les familles à la santé bucco-dentaire et à la prévention des caries.